La gestion des comportements difficiles : la punition

© Louise Rodrigue, psychologue/neuropsychologue scolaire

Ce n’est pas un secret pour personne!

Il est toujours préférable d’utiliser des stratégies proactives lorsqu’il s’agit de gestion des comportements difficiles : celles-ci visent à prévenir l’apparition du mauvais comportement.

À l’inverse d’une stratégie proactive, une stratégie réactive punitive est appliquée à la suite d’un comportement indésirable. Ce type de stratégie peut être recommandée si elle a une visée éducative, que des gestes de réparation ainsi que des conséquences logiques l’accompagnent (une conséquence désagréable est alors appliquée, ou encore, l’élève est privé de quelque chose d’agréable) et si elle complémente des pratiques proactives positives déjà mises en place.

 

Lorsque ces conditions ne sont pas respectées, les stratégies punitives sont peu recommandées : elles entrainent bien souvent une escalade de conflit, d’interactions négatives entre l’enseignant et l’élève, ce qui a pour effet d’alimenter les mauvais comportements de l’élève et l’utilisation de stratégie punitive de l’enseignant.

Il s’agit d’un véritable cercle vicieux. En classe, l’élève peut également devenir moins attentif et moins motivé à apprendre.

Pourquoi les enseignants utilisent-ils la punition alors?

Admettons-le, en contexte d’inclusion des élèves présentant des difficultés comportementales en classe ordinaire, la gestion du comportement demeure tout un défi pour les enseignants. Bien que plusieurs enseignants rapportent avoir fréquemment recours aux stratégies proactives et positives, il leur arrive aussi d’utiliser la punition, et ce, dans l’espoir de réduire ou de mettre fin au comportement problématique. Les raisons justifiant le recours à ces stratégies peuvent être diverses :

  • l’historique de l’élève ou ses antécédents avec l’enseignant;
  • l’organisation scolaire (par exemple les politiques scolaires);
  • les valeurs culturelles liées à l’éducation;
  • une réponse émotionnelle de l’enseignant suite au sentiment d’être menacé, au manque de patience ou à des problèmes personnels;
  • une volonté d’exercer un contrôle sur l’élève;
  • le fait d’attribuer la responsabilité de ses actions à des sources externes;
  • le fait que l’enseignant soit fortement préoccupé par la nuisance potentielle du comportement des élèves au climat de classe;
  • le sentiment de ne pas suffisamment bien maitriser d’autres stratégies pour être efficace;
  • le manque de planification ou de gestion d’imprévus;
  • le manque de formation sur la gestion des comportements problématiques.

Que l’on soit enseignant, ou intervenant, il est nécessaire de s’arrêter pour réfléchir aux raisons qui sous-tendent notre recours aux stratégies punitives (notre besoin). Par la suite, il importe de combler ou de répondre à ce besoin, afin d’éviter qu’il ne se manifeste de cette manière inefficace. Par exemple, si le manque de formation est à l’origine du problème, il serait à propos de se former davantage.

💡Fait intéressant 💡

Massé et al. (2020) rapportent que les variables liées à la formation de l’enseignant et ses années d’expérience ne sembleraient pas expliquer l’utilisation de ces stratégies.

L’alternative à privilégier

Enfin, lorsque faire se peut, il est préférable de privilégier la conséquence plutôt que la punition.

👎 La punition est réactive: elle résulte d’une réaction émotive de la part de l’adulte par exemple. Elle n’apprend pas à l’élève à résoudre le problème. Avec le temps, il risque surtout d’apprendre à éviter la punition et développer des sentiments négatifs envers lui, envers l’autre, et peut-être même de se révolter.

👍 La conséquence quant à elle responsabilise davantage l’élève face à ses actions. Il s’agit d’une action proactive et logique de la part de l’adulte, qui permet à l’élève de faire de la résolution de problème, tout en préservant sa dignité.

Références

Butler, A. et Monda-Amaya, L. (2016). Preservice teachers’ perceptions of challenging behavior. Teacher Education and Special Education, 39(4), 276-292. https://doi.org/10.1177/0888406416654212

Massé, L., Nadeau, M.-F., Gaudreau, N., Verret, C., Lagacé-Leblanc, J. et Bernier, V. (2020). Facteurs influençant la fréquence d’utilisation de pratiques de gestion des comportements difficiles au secondaire. Revue canadienne des sciences du comportement, 52(1), 67-77. https://doi.org/10.1037/cbs0000139

Moirier, M., Nadeau, M-F., Nadeau, S. et Beaudoin, M. (2021). Pourquoi les enseignants utilisent des stratégies punitives, La Foucade, 21(2), 30-32.

Nadeau, M.-F., Massé, L., Gaudreau, N. et Lessard, A. (2018). Portrait des croyances et pratiques des personnes inscrites en formation initiale en enseignement quant à l’éducation inclusive et les élèves présentant des difficultés comportementales. Université de Sherbrooke, Département d’enseignement au préscolaire et au primaire.

Saleem, A. et Muhammad, D. Y. (2020). Negative emotions and self-created challenges of novice public-school teachers in managing classroom. Journal of Elementary Education, 29(2), 178-195.

Dernière mise à jour: 20 janvier 2021